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Le Bar Rendez-Vous de Latulipe n'est plus...

7 mai 2020

par : Dominique Roy

photo : Daniel Gauthier

Pour les Latulipiennes et les Latulipiens, c’est un pan d’histoire qui vient de disparaître avec la démolition de l’édifice abritant l’ancien Bar Rendez-Vous, situé sur la Principale en plein milieu du village.

De l’Hôtel Déraps au Bar Rendez-Vous

Au milieu des années 1940, le 14 Principale Ouest à Latulipe est une maison à deux étages construite par Amédée St-Amant et appartenant à Arsène Déraps. Avec sa femme Adéline, il y démarre une maison de pension; l’Hôtel Déraps. En 1958-1959, Roméo Champagne et Lucienne Rheault sont les nouveaux propriétaires. La fin de la prohibition en 1961 est signe de prospérité pour l’Hôtel Champagne. On rénove et on engage du personnel pour servir alcool et repas.

En 1967, le commerce devient la propriété de Muriel Bouchard et Nicole Paquette. L’édifice est agrandi. Dix chambres et trois dortoirs sont remplis à pleine capacité 7 jours sur 7 et la section bar passe de 25 à 125 places. L’Hôtel Rendez-Vous embauche une douzaine d’employés et la salle à manger, la Fourchette d’Or, offre des plats cuisinés maison par Imelda Gingras. Le Butch Steak House fait la renommée de la maison. La vie sociale y est très active : boîte à musique avec orchestre, bal costumé, spectacles, concours de panaches avec défilé, plongeon d’automobiles au quai public, course de canots, tournoi de Shuffleboard, etc. C’est aussi à cette époque qu’un vol à main armée a lieu lors d’un spectacle. Ti-Blanc Richard est témoin de la scène alors que Réal Gingras est le préposé à la caisse et que Ghislain Dubé est pris en otage par le voleur qui s’enfuit avec 500 $ après avoir tiré un coup de feu.

Jacques Lemieux, déjà propriétaire de l’hôtel de Fugèreville, fait l’acquisition des lieux en 1979. L’entreprise devient le Bar Rendez-Vous. Sa fille Danielle (Dany) Lemieux et son gendre Marcel (Batis) Lévesque rachètent le tout en 1983. « Quand on a acheté, mon père venait de tomber malade. Donc, ça libérait ma mère pour qu’elle puisse s’occuper de lui, et nous, on se créait un emploi. On faisait d’une pierre deux coups », se souvient Dany Lemieux qui avoue avoir ressenti quelques craintes à ses débuts puisque ses deux garçons étaient encore très jeunes. « Jacno, mon plus jeune, dit souvent en farce que ce sont les clients qui l’ont éduqué et non moi. » Au fil des ans, le couple Lemieux-Lévesque s’en donne à cœur joie dans l’organisation d’activités qui connaissent beaucoup de succès dans le secteur Est : tournoi de fer, tournoi de pool, épluchette de blé d’Inde, défilé de mode, jam de musique, party d’Halloween, karaoké, orchestre, party d’huîtres, méchoui, etc. Pendant huit ans, Dany y tient même un casse-croûte. Le Bar Rendez-Vous est aussi fièrement représenté sur la scène sportive témiscamienne par son équipe de balle et son équipe de pool.

Dany et Batis ferment le bar en 2010. « Je pense que les deux dernières années ont été pénibles, surtout pour Batis. Moi, je n’avais pas la même implication que lui, donc c’était différent pour moi. Je travaillais à l’extérieur depuis un petit bout. » Comme plusieurs bars de la région, l’endroit est devenu de moins en moins achalandé, une réalité liée à deux événements particuliers selon madame Lemieux : les lois encadrant l’alcool au volant et celle les obligeant à retirer les machines à poker de leur établissement.

Jonathan Lévesque, l'aîné de Dany et Batis, a grandi là, la demeure familiale étant au deuxième étage. « Mon deuil du bar est terminé depuis que mon père l'a fermé. Maintenant c'est un vieux bâtiment à l'abandon rempli de souvenirs. Ce que je garde comme souvenirs, c'est toutes les activités qu'il y a eu. Ce sont tous de beaux souvenirs! Oui, c'est triste la démolition du bâtiment, j'ai quand même vécu là plusieurs années. Mes parents l'ont eu, je crois, pendant 27 ans. Et avant eux, il était à mes grands-parents. »

L’après Bar Rendez-Vous

En 2013, un résident de l’Ontario prend possession du bâtiment. En 2016, la justice met définitivement la clé dans la porte à la suite de la découverte d’une plantation illégale de cannabis. « Ainsi, il s'est dégradé rapidement. La municipalité est devenue propriétaire en février dernier afin de le démolir à la suite de plaintes de citoyens qui craignaient pour leur sécurité. Tout ceci est une très grande perte financière pour une petite municipalité comme la nôtre et le conseil n'a pas pris de décision concernant la future vocation du lieu », précise Julie Gilbert, directrice générale et secrétaire-trésorière pour la municipalité de Latulipe-et-Gaboury. Les travaux de démolition se sont déroulés sur deux journées, soit le vendredi 24 avril et le lundi 27 avril.

*Source historique : Livre du centenaire de Latulipe, D’hier à aujourd’hui, 1910-2010

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Courtoisie Jonathan Lévesque

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