La murale de l’école d’Earlton n’est plus!

17 octobre 2022

par : Dominique Roy | Journaliste de l’Initiative de journalisme local

photo : Gracieuseté d'Annick Boucher

L’École catholique Assomption d’Earlton subit une cure de rajeunissement. Des travaux sont à l’origine de la disparition de l’immense murale qui recouvrait l’un des murs extérieurs du bâtiment depuis une vingtaine d’années. Pour plusieurs citoyens, c’est comme si tout un pan de l’histoire du village avait été recouvert, mais pour Nicole Bélanger, qui en est la créatrice, c’est tout simplement dans la logique des choses quand il est question d’œuvres d’art public.

La création de la murale d’Earlton en quelques anecdotes

Au début des années 2000, l’ACFO-Temiskaming engageait une ou un artiste pour la réalisation de six grandes murales dans la région, soit une à Haileybury, quatre à New Liskeard et une à Earlton. L’artiste visuelle Nicole Bélanger a démontré de l’intérêt et la candidature de cette Franco-Ontarienne, originaire d’Earlton, fut retenue. C’est ainsi qu’elle s’initia à la peinture en format géant.

« C’était laissé à moi de figurer ce que je voulais mettre sur les murs qui étaient disponibles, mais on m’avait donné comme directive qu’il fallait qu’il y ait une relation entre la murale et la communauté. » Parmi les six murales qui lui ont été confiées, celle d’Earlton représentait le plus grand défi, parce qu’elle était la plus grosse et parce que le tout devait être peint à même les murs extérieurs exposés aux intempéries. La peinture acrylique utilisée pour ce projet avait été achetée à Toronto, une des meilleures peintures sur le marché, aux dires de l’artiste.

La sœur de Nicole Bélanger, Renée, est venue lui prêter main-forte. À deux, elles ont consacré un mois complet à la réalisation de l’immense murale. Des échafaudages étaient nécessaires à sa réalisation. « Dans mes souvenirs, elle avait 14 pieds de haut. Si je ne me trompe pas, il me semble qu’elle avait 114 pieds de long. C’était énorme. »

L’artiste a voulu illustrer l’histoire d’Earlton. La notion du temps y était représentée par les aigrettes d’un pissenlit qui se dispersent alors que celle de l’histoire s’exprimait par la reproduction de photos d’époque. Sur ces photos, on pouvait voir des personnalités marquantes, des objets incrustés dans la mémoire collective, des lieux significatifs, des événements mémorables. L’éducation, la religion, les sports et l’agriculture font partie des secteurs qui ont été mis en lumière dans cette œuvre gigantesque.

Une anecdote dont madame Bélanger se souvient et qui la fait bien rire, c’est l’intervention du prêtre qui n’était pas d’accord avec l’emplacement d’une photo peinte sur la murale. En fait, il y avait une énorme vache Holstein qui couvrait presque le tiers de l’œuvre. Elle représentait l’importance de l’industrie laitière à Earlton. Certaines photos étaient épinglées sur la vache, dont celle de l’église située entre les pattes de la vache. « Le prêtre est venu nous rendre visite, et il n’a pas aimé ça que cette photo-là soit sur le pis de la vache. On l’a envoyé promener un peu. On lui a dit : « Écoute, tu es le seul qui a un problème avec ça. Il n’y en a pas de problème. » Le travail était fait par le temps qu’il est venu se plaindre, donc on n’a pas changé ça. »

Pour conserver un souvenir de cette murale, Annik Boucher, directrice à l’École catholique Assomption d’Earlton l’an dernier, en a pris quelques photos et les a rassemblées dans un cadre qui pourra être affiché dans l’école.

Des centaines de murales signées Nicole Bélanger

La création des murales de l’ACFO fut la première expérience de ce type pour Nicole Bélanger. Après ce contrat, les demandes se sont multipliées. C’est devenu son métier à temps plein. Pendant vingt ans, elle en a peint des centaines, principalement dans la région d’Ottawa où elle habite. « Ma spécialité, c’est les murales participatives. Je fais participer un groupe choisi; ça peut être des aînés, ça peut être des ados, ça peut être des enfants. Je vais beaucoup dans les écoles, les centres communautaires. Je forme un concept avec les clients et ensemble, on crée la murale. » D’ailleurs, l’artiste tient à démystifier la création de ces œuvres surdimensionnées qui épatent la galerie. « La seule raison pour laquelle un projet comme ça arrive, c’est parce qu’il y a quelqu’un à quelque part qui a une vision claire, qui veut que ça se produise, qui fait en sorte que son budget aille pour une création comme ça. C’est une histoire de gens qui se mobilisent et qui décident que, pour cette année-là, c’est ça le projet qui va voir le jour. »

Enfin, la durée de vie des œuvres d’art public n’est pas éternelle. Y a-t-il un deuil à vivre lorsque la murale disparaît, comme celle à l’école d’Earlton? « Souvent, les gens se sentent très mal quand il est temps de recouvrir la murale et de faire autre chose. Et je dis tout le temps, moi, que l’œuvre artistique murale est éphémère de nature. Alors, il ne faut pas commencer à penser en termes de « c’est là pour toujours ». J’accepte que mes œuvres disparaissent avec le temps. »

Pour en connaître davantage sur la carrière artistique de Nicole Bélanger, il est possible de consulter ses deux sites Web : https://www.studiobisonlou.com/ (pour ses murales) et https://www.nicolebelangeronline.com/ (pour ses autres œuvres).

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