Chez les Fortier-Champagne, la chasse est une histoire de famille. Et cette passion ne leur a pas été transmise de génération en génération. Stéphane Champagne l’a développée lui-même en allant chasser sur les terres de son père alors qu’il était adolescent. Son cousin l’accompagnait de temps en temps; ensuite, des amis du travail. « J’ai surtout commencé dans la sauvagine. Ç’a pris du temps avant que je fasse l’orignal. »
Quand Nathalie Fortier a commencé à fréquenter Stéphane, elle ne pratiquait pas ce passe-temps. Elle ne venait pas d’une famille de chasseurs. Stéphane l’a donc initiée et elle a eu la piqûre. Quand les enfants sont arrivés, ils ont rapidement fait partie des expéditions; d’abord, comme accompagnateurs, et ensuite, comme chasseurs.
Kimi, 17 ans, et Téo, 16 ans, ont de nombreux souvenirs d’enfance liés à la pratique de la chasse, que ce soit aux oiseaux, à l’ours ou à l’original. « Je ne leur ai rien imposé. C’est venu naturellement. On les a tout le temps amenés au camp de chasse. J’ai plein de photos d’eux à la chasse quand ils étaient petits. Ils aimaient ça », raconte le père. Dès leur plus jeune âge, ils se sont impliqués dans les préparatifs : saline, tours, sentiers, construction, réparation du camp, etc.
La première fois que Kimi a accompagné son père à la chasse à l’arc, le premier jour, un orignal mâle a répondu à l’appel et s’est approché d’eux à une distance de 71 verges. La bête n’a pas été abattue, mais le « feeling » ressenti était indescriptible… assez intense pour lui donner le goût d’y retourner les jours suivants. Kimi avait 12 ans. Téo a vécu de l’action semblable. À sa première saison de chasse à l’orignal, au deuxième jour de chasse, il a vu une femelle. Dans son cas, c’était à la carabine. Pas de chance pour cette année-là; interdiction de tuer une femelle. « Mes gars sont super chanceux. Moi, ça m’a pris autour de quinze ans avant de voir un orignal dans le temps de la chasse », raconte Stéphane.
La chasse à l’ours fait partie aussi de cette passion. À ce jour, Kimi et Téo ont chacun tué un ours. Quant à leur père, il compte quatre orignaux et neuf ours à son palmarès, en plus des oies, des outardes et des canards, dont il ne conserve pas les statistiques. Même si la chasse aux oiseaux est beaucoup plus fructueuse, d’emblée, les deux adolescents disent préférer celle à l’orignal. Kimi avoue qu’il lui est difficile de se lever tôt, mais que, malgré tout, il ne manque jamais la chasse du matin. D’ailleurs, il la préfère à celle du soir. Nathalie, elle, chasse près du camp où ses hommes lui ont aménagé une saline bien à elle.
Tous les quatre sont d’accord : l’ambiance, la nature, le « feeling », le fait de pratiquer une activité en famille, le plaisir d’être au camp de chasse, le changement de la routine habituelle sont toutes des raisons qui moussent leur passion. Depuis deux ans, deux coéquipiers de chasse à l’orignal se sont joints au clan : Sébastien, le frère de Nathalie, et sa femme Jessie. Le cocon demeure donc familial. Mais cette année, le couple ne sera probablement pas de la partie; Jessie étant aux prises avec des problèmes de santé. Les larmes aux yeux, les Fortier-Champagne réalisent que la chasse de cette année s’annonce différente, difficile, mais en même temps, l’épreuve de Jessie devient leur motivation à redoubler d’efforts. « On tue pour Jessie, cette année », lance Nathalie. Parce que la chasse, elle a ça de bon; c’est un combat qui se veut rassembleur et qui permet de solidifier des liens… dans leur cas, familiaux.