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Ces commerces du Témiscamingue qui ont disparu | Un concessionnaire à Laverlochère

10 août 2020

par : Dominique Roy

photo : Livre Laverlochère - 1889-1989 - Raconte-moi ta vie

Au cours de l’été, nous vous présentons quelques commerces disparus qui, jadis, ont grandement contribué à l’économie des municipalités du Témiscamingue. Cette semaine, nous visitons un concessionnaire de motoneiges et de motocyclettes à Laverlochère.

Garage J.O. Sabourin

En 1945, un nouveau bâtiment voit le jour à Laverlochère : Ovila Sabourin (Joseph Ovila de son véritable prénom) est le propriétaire du Garage J.O. Sabourin. Il y opère un poste d’essence et il y effectue des réparations de mécanique générale sur les véhicules et la machinerie agricole. L’atelier de soudure connaît aussi un grand succès dans le comté. Situé sur la rue St-Isidore Est, ce garage connaîtra plus d’un changement d’administration et de vocation.

En 1959, Ovila ferme ses portes pour travailler dans les mines d’Elliott Lake. Peu de temps après, Noël Falardeau et ses associés prennent la relève. En plus d’offrir les services de mécanique générale, l’endroit est aussi une concession de machinerie agricole, et ce, jusqu’en 1961.

Denis B.P. Service et Garage Saber enr

En 1964, Denis Sabourin, l’un des fils d’Ovila, rachète le garage. « Je travaillais à Ville-Marie. Pourquoi ne pas partir à mon compte? Le moment était le bon », raconte-t-il. En 1968, l’entreprise connaît sa plus grande transformation. L’ancien garage se donne une vocation sportive. On y vend alors des motoneiges Polaris. Bien que l’on soit en 1968 à ce moment-là, les premières machines vendues sont des éditions de 1969. En 1971, les motos Kawasaki font leur arrivée, suivies des motos Honda en 1973. Ce lieu est devenu le rassemblement des amateurs de ce type de divertissement. D’ailleurs, c’est dans ce garage qu’ont eu lieu les discussions menant à la naissance de deux associations : le Club de stockcars et le Club de motoneiges.

« Polaris a vraiment été le plus gros vendeur du commerce. Pendant quatre ans, de 1976 à 1979, j’ai reçu la reconnaissance du meilleur vendeur Polaris au Canada », se souvient Denis Sabourin avec beaucoup de fierté, lui qui vendait une centaine de motoneiges par année.

En 1982, ce dernier s’associe à Léo Bernard afin d’incorporer l’entreprise. L’endroit porte dorénavant le nom de Garage Saber enr. La mécanique générale fait toujours partie des services offerts et on y vend maintenant des produits Shell en plus d’être dépositaire des concessions Ski Doo et Suzuki. En 1988, Denis vend le garage. « Quand j’ai décidé de vendre, on était en pleine crise économique. Avec un taux d’intérêt à 40 %, les gens n’achetaient plus de motoneige. J’ai eu une opportunité pour enseigner la mécanique à Val-d’Or. »

Cette entreprise rappelle de nombreux souvenirs à cet ancien propriétaire. « Les vols étaient nombreux, surtout pour les pièces de motos comme les miroirs, les batteries, les pneus. Dans ce temps-là, ce n’était pas attaché comme aujourd’hui avec de grosses chaînes. Les policiers nous connaissaient bien. Ils venaient souvent pour régler des histoires de vol. Un matin, des policiers sont arrivés au garage en nous disant qu’ils avaient ramené des motos dans la cour durant la nuit. Ils les avaient trouvées dans la rue. Une autre fois, on est arrivés au garage un matin, et tout le devant d’une Honda 750 avait disparu. Raoul Beaulé, mon mécanicien, n’était pas content. Il a écrit sur une pancarte : « Tant qu’à prendre le devant, prenez dont le derrière. » Le lendemain, il ne restait plus grand-chose. Le reste de la moto était tout défait. » En parlant de son employé, un autre souvenir lui revient à la mémoire. « Raoul, c’était un patenteux. On avait fait une motoneige pour nettoyer les sentiers à partir de deux motoneiges, pour que ça ouvre plus grand, pour que ce soit plus fort. On ne faisait pas d’argent avec ça, mais on faisait parler de nous autres, par exemple. On jouait aussi des tours aux clients. Des gens qu’on connaissait bien ont acheté des motoneiges plus performantes qu’à l’habitude, sans même le savoir », dit-il en riant.

Dans le domaine de la vente, c’est aussi l’époque où les fins de semaine et les congés n’existent pas. « On a déjà vendu des motoneiges le soir de la messe de minuit. Des gars étaient arrivés avec une caisse de bières et des bouteilles de fort pour fêter ça. Je me souviens aussi de mon fils Mario qui a vendu une moto 30 minutes avant son mariage. Il est arrivé pile à la messe. C’était un commerce accaparant. C’est la fin de semaine que les gens ont le temps de faire de la motoneige et de la motocyclette. Quand ça brisait, c’était donc tout de suite qu’ils voulaient une réparation. On avait fait déconnecter le téléphone à la maison et on a dû se mettre une ligne privée parce que les gens appelaient tout le temps. Quand on allait en camping, on ne le disait pas où on s’en allait pour ne pas être dérangés. »

Les festivals du Témiscamingue attiraient aussi une clientèle bien particulière. C’est le cas, entre autres, avec le Bal des Foins de Fugèreville. « Je me souviens d’un club de motards de Chibougamau qui arrêtait chez nous en passant. Les gars nous donnaient un pourboire de 20 $ pour qu’on répare leurs motos avant celles des locaux. On trouvait toutes sortes de trucs sous leurs sièges, des substances pas très légales. »

Enfin, après avoir vendu plus d’un millier de motoneiges et de motocyclettes, Denis Sabourin se souvient d’un seul client ayant payé son achat en argent comptant. « Le monsieur est arrivé avec son argent cash, en petites coupures, dans un sac de toile. Il économisait depuis longtemps. Quand il en a eu assez, il est venu acheter sa machine. »

Northem

Enfin, en février 1988, Claude Bougie se porte acquéreur du garage et le transforme en poste d’entretien pour la compagnie de transport Northem. En 1998, monsieur Bougie déménage ses opérations à Ville-Marie puisque le coût des rénovations nécessaires au bâtiment de Laverlochère est beaucoup trop élevé. L’année suivante, le garage, si riche en souvenirs, est démoli.

Garage Ovila Sabourin_web.jpg

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