Le décrochage scolaire coûte cher à l’Abitibi-Témiscamingue. C’est le constat livré le 4 juin dernier par l’économiste Frédérick Laurin, dans le cadre d’une conférence tenue à Ville-Marie. Organisé par Action Réussite Abitibi-Témiscamingue, l’évènement s’inscrivait dans une tournée régionale visant à sensibiliser les milieux à l’ampleur des répercussions économiques d’un faible taux de diplomation.
Selon les données présentées, le coût total du décrochage scolaire pour la région s’élève à environ 650 millions de dollars par année, dont 180 millions en richesse collective perdue et 415 millions en coûts supplémentaires pour l’État. Ces sommes englobent les pertes salariales, les dépenses liées à l’assurance-emploi, à la santé et aux aides sociales.
« En moyenne, un décrocheur gagne 19 703 $ de moins par année qu’un diplômé. Multipliez ça par toutes les personnes sans diplôme dans la région et vous obtenez un manque à gagner majeur pour l’économie », a expliqué monsieur Laurin. Il rappelle que les conséquences vont bien au-delà de la simple comptabilité publique. « Le décrochage scolaire affecte l’innovation, la productivité, l’entrepreneuriat, l’attractivité et même la cohésion sociale. »
La conférence a attiré plusieurs partenaires issus des milieux scolaire, communautaire, politique et économique. Tous reconnaissent l’importance d’unir les forces pour enrayer un phénomène qui compromet la capacité de la région à se diversifier.
Toujours selon monsieur Laurin, l’Abitibi-Témiscamingue est particulièrement vulnérable, car son marché du travail absorbe encore facilement une main-d’œuvre peu qualifiée. « Un jeune peut gagner un bon salaire en foresterie ou dans l’industrie minière sans diplôme. Ça crée une fausse impression de sécurité. Le problème, c’est que ça perpétue un modèle économique centré sur des secteurs à faible valeur ajoutée. »
Cette dynamique mène à un cercle vicieux : un taux élevé de décrochage limite les possibilités de développement dans des secteurs innovants, ce qui à son tour maintient une demande pour de la main-d’œuvre moins qualifiée. « Pour sortir de ce cycle, il faut miser sur l’éducation. C’est un investissement, pas une dépense », a-t-il insisté.
Action Réussite Abitibi-Témiscamingue, l’instance responsable de la tournée, rappelle que la réussite éducative est l’affaire de tous. En misant sur une mobilisation concertée des acteurs locaux, elle souhaite faire de l’éducation un véritable levier de développement durable pour la région. « Le but de la tournée, c’est de faire prendre conscience aux élus et aux intervenants de l’importance d’agir. Financer des mesures de persévérance scolaire, c’est rentable. On doit le voir comme un pilier économique, au même titre que les routes ou les infrastructures », a conclu l’économiste.