Alors que certaines projections prévoient un déclin démographique pour l’Abitibi-Témiscamingue d’ici 2051, le Témiscamingue, lui, a choisi d’agir. Depuis 2017, le comté a adopté un premier plan stratégique de développement démographique afin d’inverser la tendance. C’est également à cette période que sont nés les slogans identitaires « Là où on vit » et « Fièrement d’ici », devenus des symboles de fierté et d’attachement au territoire.

Ce tournant stratégique est le fruit d’une collaboration étroite entre la Municipalité régionale de comté du Témiscamingue (MRCT), le Carrefour jeunesse-emploi du Témiscamingue (CJET) et la Société de développement du Témiscamingue (SDT). Ensemble, ces acteurs ont misé sur une approche axée sur l’attractivité, l’accueil et l’intégration, pour assurer une croissance durable.

Entre 2016 et 2024, la population du Témiscamingue est passée de 15 971 à 16 350 habitants. Ce gain net, à contre-courant des prévisions, témoigne de l’efficacité des efforts déployés. « Alors qu’on anticipait une perte de plus de 500 personnes, nous avons plutôt enregistré une croissance démographique. C’est la preuve que nos démarches portent leurs fruits », souligne Nadia Bellehumeur, directrice générale de la SDT.

Pour Lyne Gironne, directrice générale, greffière et trésorière de la MRCT, ces résultats s’expliquent également par des investissements majeurs et une vision à long terme. « On ne peut pas espérer des résultats en deux ou trois ans. Il faut penser en termes de 15 à 20 ans. La Gaspésie, par exemple, a mis deux décennies à voir les effets de ses actions démographiques. »

Les retombées de cette mobilisation régionale sont aujourd’hui visibles. L’embauche d’un agent en attractivité, un accompagnement renforcé du CJET et une gamme de services personnalisés ont facilité l’établissement de nombreux nouveaux résidents (professionnels, techniciens, diplômés) qui participent activement à la vitalité économique locale et au maintien des services de proximité.

Dans cette optique, plusieurs initiatives concrètes ont vu le jour, dont des séjours exploratoires pour découvrir le territoire, de l’accompagnement personnalisé sur les plans administratif, social et professionnel, des activités de réseautage favorisant les liens entre nouveaux résidents et population locale. « Le taux de participation élevé à ces activités démontre l’engagement réel de la communauté. Cela crée un sentiment d’appartenance fort et un climat d’ouverture », souligne Marie Aubry, agente d’accueil et de rétention au CJET.

« Grâce à cette croissance, des entreprises comme Fermes boréales ou Témisko ont pu pourvoir des postes stratégiques. Le secteur public, notamment en santé et en éducation, a également vu plusieurs postes vacants comblés. Aujourd’hui, un employé sur cinq à la MRCT provient des nouveaux arrivants », ajoute madame Gironne.

Selon Marie Aubry, la croissance démographique a également permis de revitaliser les commerces, maintenir certaines écoles et stimuler la vie communautaire, notamment grâce à l’implication bénévole des nouveaux arrivants. La diversité culturelle grandissante constitue un enrichissement important pour l’ensemble de la communauté.

Les intervenantes notent toutefois que cette transformation soulève aussi certains défis, notamment l’accès au logement, la disponibilité des services de garde, les défis liés au transport et l’adaptation des milieux de travail à cette nouvelle diversité.

Pour y répondre, la MRCT et plusieurs municipalités ont adopté des politiques favorisant l’accueil et l’intégration des nouveaux arrivants. « Nous misons sur des politiques municipales inclusives et la création d’une table de concertation interorganismes. Cet espace de dialogue et de coordination permet de mieux cerner les besoins des nouveaux résidents et de proposer des solutions concrètes et efficaces », dit Lyne Gironne.

Le nouveau plan stratégique 2024-2030 met l’accent sur le maintien d’un solde migratoire positif. Plutôt que de viser des objectifs purement quantitatifs, il s’agit de favoriser l’établissement durable des personnes et des familles, et de consolider la population à long terme. Avec près de 800 postes encore vacants, la région dispose d’un fort potentiel d’attraction.

Ce plan comprend une série de mesures concrètes, telles que des campagnes de sensibilisation à la diversité culturelle, la promotion des emplois disponibles, la mise en valeur des entreprises locales, les possibilités d’implication citoyenne ainsi que les services offerts sur le territoire. Il prévoit également la réalisation de portraits et le suivi des travailleurs temporaires et saisonniers, des formations en gestion de la diversité à l’intention des entreprises, des intervenants et des citoyens, ainsi que des campagnes promotionnelles annuelles. Des initiatives ciblées visent enfin à attirer les jeunes et à encourager leur retour dans la région. L’objectif est de bâtir un milieu de vie inclusif, accueillant, stimulant et durable, où tout le monde peut s’épanouir.