
Depuis qu’il est tout jeune, Hugues Bellehumeur s’est toujours senti différent. À l’école St-Isidore de Laverlochère, alors que les autres garçons s’amusaient à faire la course et à se chamailler, il passait ses récréations à écouter le vent dans les feuilles et à observer la lumière du soleil qui se reflétait dans les flaques d’eau. « Je parlais à Dieu, explique-t-il. On m’avait dit que c’était Dieu qui avait créé la nature et que, si je lui parlais, il m’écouterait, donc, je le remerciais pour ce qu’il avait créé. »
C’est dans ses premières années à l’école primaire que monsieur Bellehumeur commence à prendre conscience qu’il comprend mal les intérêts des autres jeunes de son âge. « Je disais que je ne voulais pas d’amis », se souvient-il. Sa grande sensibilité le faisait sentir vulnérable. Il était constamment en mode survie et était indifférent aux jeux de ses camarades. En classe, il bloquait sur des détails, éprouvait de la difficulté à s’organiser. « Heureusement, à l’époque, l’encadrement était différent. Si on avait travaillé par projets, en équipe, comme c’est souvent le cas aujourd’hui, ç’aurait été catastrophique. »

Les années ont passé et le chemin ne fut pas de tout repos. Alcoolisme, dépression, idées suicidaires et dépendance aux jeux vidéo ont marqué le parcours d’Hugues Bellehumeur alors qu’il tentait par tous les moyens de noyer ses émotions et d’apaiser ses souffrances. Puis, à l’âge de 35 ans, alors qu’il regarde la télé, il aperçoit une courte performance de l’humoriste Louis T. et, en écoutant les propos de l’homme, Hugues Bellehumeur réalise pour la toute première fois qu’il est peut-être autiste.
Curieux et sentant qu’il a mis le doigt sur quelque chose, il se met alors à se documenter sur le sujet et il se reconnaît dans les livres et les vidéos qu’il consulte. Hypersensibilité au bruit et aux contacts physiques non anticipés, difficultés au niveau social et fatigue extrême à la suite de contacts sociaux sont quelques-uns des symptômes avec lesquels il avait appris à vivre tant bien que mal au fil des années. Après un mois de lecture intensive, afin d’assimiler cette nouvelle donnée, il se lance dans l’écriture. « Il fallait que ça sorte. J’avais besoin de classer et de mettre en ordre toutes les idées mélangées que j’avais en tête. Ce processus m’a permis de me voir », admet monsieur Bellehumeur. Après trois mois d’écriture, il avait terminé le premier jet de son livre Perdu | Un enfant venu d’ailleurs. « J’ai écrit le livre que j’aurais voulu trouver », exprime-t-il.

Il aura par la suite fallu un an pour peaufiner le texte et le faire relire par des personnes de son entourage afin de conclure le projet d’écriture. Après avoir reçu les commentaires de ses premiers lecteurs, Hugues Bellehumeur a senti qu’il avait une mission. Ce livre devait être publié. Toutefois, il ne se sentait pas à l’aise de publier un livre sur l’autisme sans avoir au préalable reçu un diagnostic officiel. C’est donc tout récemment, en février dernier, que monsieur Bellehumeur l’a obtenu. « Le médecin m’a dit que j’étais un beau cas », mentionne-t-il.
Hugues Bellehumeur a choisi de parler ouvertement de son autisme en démarrant sa chaîne YouTube, sur laquelle il a publié jusqu’à présent deux vidéos, dont celle de son lancement de livre le 2 mars dernier. Il souhaite réaliser d’autres vidéos pour détailler sa condition et décortiquer l’autisme afin d’en faciliter la compréhension aux personnes neurotypiques. Son livre Perdu | Un enfant venu d’ailleurs, est disponible en versions papier, numérique et audio. Il fait également partie du regroupement Aut’Créatifs, un mouvement de personnes autistes en faveur de la reconnaissance positive de l’autisme. « Je suis en train d’exister », exprime Hugues Bellehumeur, qui est désormais déterminé à faire entendre sa voix pour lever le voile sur les mystères de l’autisme.