Luc Gélinas est journaliste sportif à RDS et couvre les activités liées aux Canadiens de Montréal depuis 1992. Il a aussi signé plusieurs livres à succès au cours des dernières années, dont Steve Bégin : ténacité, courage, leadership ainsi que les séries jeunesse C’est la faute à… (Hurtubise) et L’étonnante saison des Pumas (Éditions Z’ailées).
Cette semaine, les séries de la LNH m’amènent à New York pour couvrir les deux premiers matchs de l’association de l’Est entre le Lightning et les Rangers. Autant j’adore l’énergie de la ville, autant le mythique Madison Square Garden est l’un de mes amphithéâtres préférés.
D’abord, fait inusité, la glace se retrouve au cinquième étage. Autre aspect unique, il y a quelques années, lorsque l’on empruntait les larges corridors qui montent en serpentin vers la patinoire, il y avait souvent une odeur familière qui me ramenait à mes souvenirs d’enfance ! Ayant grandi dans un petit village en Mauricie, je repère rapidement les arômes de fumier et ça sentait souvent ça au vieux MSG, lors de mes premières années de couverture du hockey. Comme le cirque Barnum & Bailey tenait régulièrement l’affiche dans le building, les lions, les tigres et surtout les éléphants laissaient quelques effluves à chacun de leurs nombreux passages et le parfum semblait visiblement imprégné dans le vieux plancher en ciment.
Mais le MSG me rappelle surtout la toute dernière partie de Wayne Gretzky. Ça se passait le 18 avril 1998. Une semaine auparavant, à la surprise générale, la vedette des Rangers avait annoncé qu’elle prendrait sa retraite à l’issue de la saison. À la dernière minute, RDS avait donc décidé de modifier sa grille horaire pour présenter ce rendez-vous avec l’histoire. Domenic Vannelli, mon patron de l’époque, m’avait délégué sur place en catastrophe. La partie avait aussi été diffusée à la grandeur du pays en anglais grâce à CBC qui avait également réagi rapidement pour retransmettre ce duel face aux Penguins.
Bénéficiant du premier choix, la veille du match, le réseau local avait demandé à obtenir une entrevue avec Gretzky pour le premier entracte. CBC avait choisi de lui parler pendant la période d’échauffement et RDS avait hérité sans le vouloir du deuxième entracte. Un coup du destin fabuleux qui a fait en sorte que je me suis retrouvé à être le dernier journaliste à réaliser une entrevue avec Wayne Gretzky avant sa retraite. Je me souviens encore de la grande fierté qui m’habitait lorsqu’à la fin je lui ai dit « Merci, Wayne et profite bien de tes derniers coups de patin dans la Ligue nationale ».
Environ quarante minutes plus tard, l’exceptionnelle carrière de Wayne Gretzky était terminée. Avec 62 points en 70 parties, La Merveille s’est retirée à l’âge de trente-huit ans, au premier rang des marqueurs Rangers lors de cette dernière saison. « Je n’ai marqué que neuf buts cette année, il y a quelques années, neuf buts c’était une bonne fin de semaine », avait dit Gretzky en riant.
Plus tard, quand ma carrière sera terminée, sur le bord d’un feu ou les deux pieds sur un pouf dans le salon, ce sera certainement un des plus beaux souvenirs que j’aimerais raconter à mes petits-enfants.
