D’après la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante, la grève a coûté plus de 76 millions de dollars par jour aux entreprises canadiennes, pour un total de près de deux milliards de dollars aux PME, et celles du Témiscamingue n’y échappent pas.
Chez Clément Chrysler de Lorrainville, cette grève est réellement problématique : chèques pris en otage à la poste, comptes impossibles à payer, difficulté avec Hydro-Québec pour s’inscrire à la facture commerciale en ligne, facture de 42 $ du transporteur GLS pour envoyer un contrat de travail à Québec et de 65 $ avec Purolator pour une enveloppe de 9’’ X 12’’. Marco Clément mentionne également les délais de livraison qui ne cessent d’augmenter, entre autres, une commande en provenance de Toronto qui arrive habituellement le lendemain prend maintenant de deux à trois jours. Selon ses observations, ce problème semble récurrent chez la plupart des commerçants.
Chez Bergeron Électronique, plusieurs colis ne sont pas encore reçus. Outre ce défi, Claude Bergeron se dit quand même assez chanceux puisque la dernière grève de Postes Canada avait entraîné la conversion de plusieurs clients aux paiements électroniques. « Certains commerçants sont même venus payer en personne », mentionne-t-il.
C’est le même son de cloche du côté des Équipements Cardinal d’Angliers. Karie Bernèche voit cette grève comme une façon de convertir aux paiements en ligne les quelques clients qui payaient encore par chèque. Cependant, l’entreprise attend encore quatre paquets perdus dans le transport depuis quelques semaines. Au moment d’écrire ces lignes, ils n’ont pas toujours été retrouvés par le transporteur GLS. « J’imagine que la pression est sur eux côté volume non habituel », constate-t-elle. En effet, les transporteurs ne suffisent plus à la demande, peinant à pallier le million de colis qui transite chaque jour de décembre via Postes Canada.
À Angliers, le bureau de poste est situé à même l’épicerie Bernèche & Fille. La propriétaire, Julie Bernèche-Plante, remarque notamment une baisse d’achalandage. Est-ce dû à la météo ou à la grève de Postes Canada? Elle ne saurait le dire, mais chose certaine, les clients espacent davantage leur visite au marché.
Karen Lachapelle est propriétaire de plus d’une entreprise. Les contrecoups, elle les ressent donc en triple. « La grève de Postes Canada a un impact direct sur nos activités. Au journal Le Reflet Témiscamien, la distribution des abonnements est interrompue, ce qui complique l'accès à nos lecteurs. Nos autres entreprises, comme la boutique SensAT et Impression Design Grafik, ressentent également les effets, car il devient difficile de livrer efficacement nos produits et commandes dans plusieurs communautés plus éloignées. Nos ventes en ligne pour les éditions Z’ailées sont aussi perturbées. De plus, nous avons dû mettre sur pause plusieurs projets nécessitant la distribution par Postes Canada, ce qui entraîne des pertes financières significatives. »
Les impacts sont présents dans les communautés rurales, notamment pour les propriétaires de fermes qui paient leurs fournisseurs par chèque et qui sont également payés de cette façon. C’est le cas, entre autres, pour Bobby Baril, de la ferme Baril Bon Lait. « J’ai un fournisseur que son chèque est pris à la poste. » Pour le reste, tout semble encore bien se dérouler de son côté. « Sinon, les paiements se font presque à 100 % par virement bancaire. Il y a seulement les chèques de l’encan qui arrivaient par la poste, mais maintenant, le transporteur nous les rapporte la semaine suivante. C’est peut-être plus problématique pour les fermes qui envoient rarement des animaux à l’encan. »
Le conflit perdure depuis le 14 novembre. Le Conseil canadien des relations industrielles a ordonné le retour au travail des employés de Postes Canada à compter du 17 décembre, alors que les modalités de la convention collective sont prolongées jusqu’au 22 mai 2025.