Le 26 mai dernier à Montréal, la Première Nation de Kebaowek a réuni une imposante coalition de Chefs et Grands Chefs autochtones, de groupes environnementaux, d’élus municipaux et de représentants politiques afin de demander aux gouvernements fédéral et québécois de rejeter le projet de l’Installation de gestion des déchets près de la surface (IGDPS) à Chalk River, en Ontario. Situé à moins d’un kilomètre de la rivière des Outaouais, ce projet suscite une opposition croissante, notamment en raison de ses risques environnementaux et de son absence de consentement autochtone.
Organisé en collaboration avec Indigenous Climate Action, le rassemblement comprenait un panel d’experts animé par le Chef Lance Haymond, Justin Roy, Verna Polson et Rosanne Van Schie. Le public y a découvert les dimensions juridiques, environnementales et liées aux droits humains de ce projet controversé. Bien que la Cour fédérale ait donné raison à la Première Nation de Kebaowek à deux reprises, les Laboratoires nucléaires canadiens (LNC), appuyés par la Commission canadienne de sûreté nucléaire (CCSN), poursuivent leur démarche, contestant en appel les décisions judiciaires.
« Nous avons gagné deux fois en Cour, mais les LNC refusent d’écouter », a déclaré le Chef Lance Haymond. « Leurs appels des jugements ne sont pas seulement une attaque contre les droits de notre Nation – c’est un mépris pour la sécurité de millions de personnes et pour l’avenir de la Kichi Sibi. Nous ne reculerons pas, et nous ne laisserons pas ce projet passer sous silence. »
En février 2025, la Cour fédérale avait conclu que la CCSN n’avait pas respecté son devoir constitutionnel de consultation auprès de la Nation Kebaowek et avait ignoré les principes de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones. En mars, un second jugement a confirmé que les LNC avaient violé la Loi sur les espèces en péril en ne considérant pas d'autres emplacements et en négligeant les impacts sur la faune menacée. Ces deux décisions sont désormais contestées devant la Cour d’appel fédérale, où Kebaowek se prépare à défendre leur validité.
« Il ne s’agit pas seulement d’une bataille juridique – c’est une question de justice intergénérationnelle », a affirmé Justin Roy, conseiller et directeur du développement économique pour Kebaowek. « Nous sommes ici pour défendre non seulement la terre et l’eau, mais aussi le droit des générations futures à vivre sans crainte de contamination nucléaire. »
Lors de la conférence de presse, les intervenants ont dénoncé un projet avancé sans acceptabilité sociale et en violation des principes démocratiques, environnementaux et autochtones. « La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones n’est pas facultative. Elle constitue la norme juridique et morale que le Canada s’est engagé à respecter. Le fait d’imposer une installation de traitement des déchets nucléaires sans consentement libre, préalable et éclairé est une violation directe de cet engagement. Si la réconciliation a un sens, alors ce projet doit être rejeté », a déclaré Francis Verreault-Paul, Chef de l’Assemblée des Premières Nations Québec-Labrador.
En parallèle des démarches judiciaires, la Première Nation de Kebaowek presse le gouvernement du Québec d’exercer ses pouvoirs en matière de protection de l’environnement et de l’eau potable pour s’opposer officiellement au projet. Le mouvement bénéficie d’un soutien grandissant : plus d’une centaine d’organismes environnementaux, d’acteurs de la société civile, de municipalités et de MRC ont annoncé leur intention d’intervenir politiquement dans les prochains mois.
Afin de soutenir les recours judiciaires, la communauté lance un appel à la solidarité publique à travers la campagne RAVEN, un fonds de soutien pour les batailles juridiques autochtones. « Cet appel ne fait que renforcer notre détermination », a ajouté le Chef Haymond. « Plus que jamais, nous avons besoin du soutien du public pour que les voix autochtones soient entendues et que la rivière des Outaouais soit protégée. Nous encourageons tout le monde à soutenir la campagne RAVEN de la Première Nation de Kebaowek et à contribuer à ce combat crucial. »