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Il était une fois, dans le Témis de jadis... Un festival disparu

27 novembre 2020

par : Dominique Roy

photo : Livre La vie à Fugèreville, d’hier à aujourd’hui : 1912 – 1987

Pour cette chronique, dirigeons-nous à Fugèreville et revivons l’époque du Bal des Foins, un festival bien ancré dans la mémoire collective des Témiscamiens.

Une fête populaire

Les festivals jouent un rôle de premier plan dans les loisirs et les sorties des gens du Témiscamingue. Il y eut une époque où chaque village avait sa fête populaire, une date précise, indélogeable, marquée au fer rouge dans le calendrier des activités municipales à ne pas manquer. Fugèreville avait son Bal des Foins, l’une des festivités les plus populaires de la région. De 1960 à 1984, des gens provenant de tous les coins du Témiscamingue, de l’Abitibi et du nord de l’Ontario réservaient la dernière fin de semaine du mois de juillet pour y participer. On l’appelait le Bal des Foins puisque sa tenue marquait la fin de la période des foins pour les agriculteurs, de durs labeurs qui valaient la peine d’être fêtés.

Le site et les festivités

La première année de l’événement, en juillet 1960, c’est dans la cour du Bar Salon 382 que le tout se déroule. Kiosques, promenades en charrette et soirée dansante sont à l’horaire. Les Marcotte, les Murray, les Larivière font, entre autres, partie des premières familles à l’origine de cette organisation. Le festival connaît un tel succès que le comité décide de répéter l’expérience l’été suivant. Un stand de danse est alors construit, une première au Témiscamingue. « On avait une couple de kiosques. On avait des charrettes à foin, comme on disait, pis dans ce temps-là, on n’avait pas de permis de boisson. On ne pouvait pas vendre de boisson. On s’était fait un petit kiosque au crique, à l’autre bout de la terre à Eugène Lefebvre. Là, y avait des rides de charrettes pis les gars allaient s’approvisionner de boisson à l’autre boutte. En dernier, on avait moins de monde icitte [sur les lieux du festival], ils se tenaient tous à l’autre boutte », raconte Henri-Louis Murray, cité dans le livre La vie à Fugèreville, d’hier à aujourd’hui : 1912 – 1987.

Deux ans plus tard, le lieu de rassemblement déménage près du terrain de balle, sur l’ancien terrain de la Fabrique. Huit kiosques sont installés sur ce nouvel emplacement et c’est la compagnie Paradis et Fils qui fournit les matériaux et la main-d’œuvre pour ces nouvelles constructions. D’autres s’ajoutent au fil des ans. Un bar est enfin permis sur les lieux, au grand bonheur des festivaliers. L’activité qui se déroulait au départ sur une seule journée connaît un tel engouement que les organisateurs décident d’étirer les festivités sur une fin de semaine complète. Ainsi, des activités sont ajoutées à l’horaire : tire de chevaux, souque à la corde, tournoi de fer, tournoi de baseball, rallye d’autos ou de tracteurs, danse avec orchestre, bingo et jeux de hasard, de tout pour tous les goûts.

Onil Beaulé se souvient des kiosques de jeux, des Fermières qui vendaient des épis de maïs, du spaghetti et des sandwichs, du gros feu de camp, du rallye en tracteur et du tournoi de balle. « En 1980, on avait notre équipe de balle, les Beaulé. J’avais 18 ans et j’étais le plus jeune. On avait perdu en finale. Mon père a été dans le comité du Bal pendant plusieurs années. Je me souviens que nous allions travailler sur le terrain pour placer les balles de foin et le foin sur la piste de danse. Je me souviens aussi que certaines personnes, un peu trop saoules, couchaient dans le foin un peu partout. Et comme dans plusieurs festivals ou soirées dans ces années-là, il y avait toujours de la bataille. »

« Dans les années 70, c’était le deuxième plus gros festival du Québec après celui de Sainte-Rose. Les gros clubs de motards venaient de partout. Ils s’installaient dans le camping en arrière de l’hôtel et on les voyait se promener pendant une semaine », se rappelle Carmelle Dubois. Ses parents, Gilbert Dubois et Thérèse Perron, étaient propriétaires du Restaurant du Coin. Au Bal, amis et parenté venaient prêter main-forte. Dans la cuisine s’opérait un véritable travail à la chaîne pour répondre à la demande. « Pendant le festival, à 5 h du matin, ça frappait déjà à la porte du restaurant pour avoir un café ou un déjeuner. Il y avait un va-et-vient épouvantable. »

Nombreux sont les festivaliers à se souvenir des fameuses promenades en charrette tirée par des chevaux. Aux dires de plusieurs, c’est dans cette charrette remplie de foin que les couples se donnaient rendez-vous en fin de soirée. Semble-t-il que plusieurs enfants y auraient même été conçus.

Les profits

Les profits générés par le Bal des Foins sont réinvestis dans la localité. Tous profitent de cette source de revenus supplémentaires qui permet, entre autres, d’acheter un camion à incendie, de financer la construction d’une salle de quilles de concert avec la municipalité, de fournir des équipements et des uniformes aux clubs de baseball et de hockey du village, de contribuer à l’achat d’une machine pour faire et entretenir les sentiers du club de motoneige, d’aider financièrement la Fabrique à rénover l’église, etc. Les Dames Fermières qui s’occupent du kiosque de nourriture bénéficient aussi des profits leur permettant d’assurer le fonctionnement de leur groupement pour toute l’année.

La fin du festival

Au début des années 80, le Bal des Foins perd de sa popularité en raison de la tenue d’activités régionales à plus grand déploiement. La dernière édition se tient donc en 1984. Ainsi, après plus de 20 ans de festivités, le comité se dissout. L’événement n’est plus, mais il laisse de bons souvenirs à tous ceux qui y ont participé.

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*Les photos et plusieurs informations historiques proviennent du livre La vie à Fugèreville, d’hier à aujourd’hui : 1912 – 1987

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